CHEVREUIL
Tirez profit des petits boisés
Je ne suis pas en train de dévoiler un grand secret à personne en affirmant que la pression de chasse aux chevreuils dans le sud du Québec est à un point tel que les terres de qualité disponibles se font rares. Les prix de location sont de plus en plus élevés et même si vous avez la chance de mettre la main sur un beau morceau boisé en milieu agro-forestier couvrant plusieurs centaines d’acres, cela ne vous assurera pas une récolte de qualité. Comme si ce n’était pas assez, les prix exponentiels de la tonne de maïs et/ou de soya ont fait en sorte que chaque parcelle de terrain exempt de forêt est vite convertie en champ productif. En contrepartie, la machinerie agricole est devenue tellement grosse que plusieurs petites parcelles ont dû être abandonnées et retournées en terres décrites comme incultes ou en friches. D’autres petits îlots de forêt çà et là ne sont pas utilisés par les chasseurs pour les mêmes raisons de manque de grandeur.
Le territoire d’un chevreuil inclut un paquet de ces petites parcelles incultes ou inexploitables qui sont souvent complètement oubliées des chasseurs par manque de surface ou d’imagination ou encore de connaissance des comportements des mâles matures en période de chasse. Ces petites surfaces sont aussi plus faciles à louer car elles intéressent peu de monde.
Ces surfaces généralement plus petites qu’une quinzaine d’acres sont à l’occasion parfaites pour cacher du chevreuil et oui; possiblement le buck d’une vie. Plusieurs de ces îlots forestiers touchent des cultures de hautes qualités comme le soya ou la luzerne et empêchent le chevreuil de couvrir de grande surface pour aller se cacher au lever du jour (photo 1).
Photo 1 : lorsque la nourriture naturelle est abondante et que la plupart des chasseurs optent pour chasser à l’aide d’un système d’appâtage, le chasseur de mâle mature a avantage à bien évaluer les petites zones de forêts denses souvent oubliées. Celle ci-dessus se prête bien à l’exercice. Dense au niveau vertical et à proximité des zones alimentaires, elle pourrait cacher un mâle solitaire. Il suffit de chasser discrètement par terre à bon vent assis sur une petite chaise pliante. La position (A) par vent ouest ou nord-ouest et (B) par vent de pluie est. Dans les deux cas, ce sera une chasse de mi-journée jusqu’à la nuit.
Pour la suite de cet article, je vais vous présenter plusieurs photos aériennes montrant de très bons exemples de petits morceaux de terre oubliés par les chasseurs qui pourraient facilement vous mener vers le succès.
Trouver les bons petits îlots forestiers
Pour en tirer avantage, vous devez comprendre comment et pourquoi ces chevreuils les utilisent. Cette partie est d’une importance capitale car même si vous avez déniché quelques petits morceaux d’une dizaine d’acres, ce ne sont certainement pas les seuls morceaux forestiers que les chevreuils utilisent pour survivre dans votre secteur. Rappelez-vous que les chevreuils du sud du Québec ont souvent des territoires de plusieurs centaines d’acres et plus.
Pour vous aider à comprendre, j’aime ramener l’équation à l’humain et l’utilisation de sa maison et de son habitat environnant. À un certain temps dans la journée, vous avez tendance à être dans la cuisine, dans le salon, dans votre chambre ou encore sur le chemin vers votre travail. Certaines places comme votre chambre, vous y passez beaucoup de temps mais sur peu de visites. Dans d’autres secteurs de votre maison comme le passage entre la salle de bain, la cuisine et la chambre à coucher, vous y restez peu de temps mais passez probablement plus souvent que toutes les autres places de la maison.
C’est exactement le genre de job ou réflexion que vous devez faire pour vos chevreuils. Trouvez des bons petits îlots forestiers, les observer à distance pour déterminer si des chevreuils s’en intéressent et essayer de trouver les petits couloirs plus utilisés (photo 2).
Photo 2 : ce genre d’îlot photographié au printemps laisse présager des environs au garde-manger impressionnant car les champs en terre seront soit du soya ou du maïs ou les deux. Fin août, vous devriez à distance à l’aide de binoculaires y porter une attention spéciale, pour comprendre l’utilisation de cette petite parcelle de bois par les chevreuils. Ça pourrait être votre cadeau durant la chasse à l’arbalète avant la récolte du soya.
Si vous n’avez pas beaucoup de temps à investir à l’observation à distance des champs ou bûcher, c’est là que vos caméras de surveillance peuvent faire la différence. Contrairement à ce que vous auriez cru, vous placez vos caméras sur les bordures des îlots forestiers sans y pénétrer car ces petits morceaux de forêts sont sensibles au dérangement. Idéalement si possible, mettez vos caméras sur des sentiers à quelques mètres des parcelles de bois choisies. Pas trop de piétinage aux alentours pour annoncer vos couleurs (photo 3).
Par contre, les alentours sont beaucoup moins sensibles puisque les fermiers, leurs tracteurs, leurs chiens font partie des dérangements quotidiens de leur vie. Les chevreuils ont choisi ces secteurs pour deux raisons soit parce qu’ils sont très près de sources alimentaires ou encore parce qu’ils sont toujours oubliés des chasseurs.
Photo 3 : pour les petites parcelles de bois, il est conseillé d’installer les caméras sur les sentiers en bordure plutôt qu’à l’intérieure pour éviter les dérangements.
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Pendant la saison arc/arbalète
Une fois que vous avez trouvé quelques petites parcelles de forêt abritant le genre de chevreuil que vous recherchez et que vous avez obtenu la permission, comment pouvez-vous vous assurer du retour de ce dernier dans le secteur et à portée de tir de votre mirador ou secteur d’affût. Malheureusement il n’y a rien de sûr mais la patience est le mot clé. Si l’îlot choisi est partie prenante du territoire régulier d’un buck, il reviendra tôt ou tard. Généralement ces parcelles forestières sont très petites et les chevreuils qui y vivent sont donc très fragiles aux différents facteurs externes comme les pratiques agricoles, la pression de chasse aux outardes par exemple ou simplement un marcheur.
Voici un exemple de changement à noter. Un îlot d’une dizaine d’acres entouré de champs de maïs peut très bien être utilisé comme refuge et avoir beaucoup d’activités journalières jusqu’en mi-octobre (photo 4). Pourtant aussitôt que le maïs sera récolté, les mouvements seront nocturnes ou plus encore les chevreuils auront presque tous déserté l’îlot en question par manque de sécurité ou par éloignement des sources de nourriture valable. L’expérience vous aura appris que ce secteur est bon durant la saison d’arc et arbalète mais à être abandonné durant le rut.
Photo 4 : voici l’exemple parfait d’un petit morceau de 20 acres stratégiques pour l’arc et l’arbalète mais qui sera possiblement nul lorsque la saison de carabine viendra car le soya et le maïs auront été récoltés et les chevreuils se seront déplacés sous d’autres couverts plus propices à leurs besoins alimentaires.
Ne pas appâter et ne pas laisser d’odeurs
Si vous avez déniché un petit secteur forestier inoccupé par les chasseurs et que vous prévoyez y chasser que quelques jours à la carabine, essayez de ne pas y mettre les pieds avant la deuxième semaine de chasse à la carabine et de ne pas appâter le secteur. Laissez la pression de chasse des secteurs avoisinants pousser les chevreuils dans vos secteurs exempts d’odeur humaine. N’allez pas ruiner quelques mois d’effort à repérer cette petite surface magique en la polluant exactement des mêmes odeurs que tous les autres secteurs de chasse avoisinants soit celles des humains, leur VTT et leurs pommes.
Le point le plus critique quand vous chassez de petites forêts isolées; vos odeurs. Vous devez faire très attention à chasser exclusivement avec un vent de face et sans compromis (voir photo 5). Ce qui veut dire que vous ne devriez jamais chasser très profondément à l’intérieur de la bordure de l’îlot et en bas du vent.
Photo 5 : voici l’exemple parfait d’une trappe de bois de 15 acres à fort potentiel qui demande une approche méticuleuse avec le vent. Les secteurs d’affût A et B seront pour les vents ouest et nord-ouest tandis que C et D seront pour les journées pluvieuses à vent est.
Vous auriez également avantage à mettre le paquet et bien nettoyer tous vos vêtements et votre équipement avec des désinfectants spécialisés. C’est justement pour cette raison que le summum serait d’avoir plusieurs (deux ou trois) parcelles différentes pour les options de vents différents ou pour faire simplement une rotation pour ne chasser que deux fois par semaine chaque parcelle. Rappelez-vous de la facilité à brûler de si petites surfaces quand vous avez affaire à un vieux mâle.
Éviter le dérangement
Un dernier point d’importance capitale directement relié à la chasse aux petites surface de moins de 20 acres particulièrement celles isolées des grands morceaux forestiers; le dérangement au moment de s’installer pour la chasse. La facilité avec laquelle les chevreuils peuvent vous détecter est la raison première du choix de cette surface par ces derniers. Si le morceau choisi est trop petit pour vous y introduire sans déranger, vous comprendrez que vous devrez vous y introduire lors de leur absence soit quelques heures avant le lever du jour et donc avant leur retour.
Ce qui pose un autre problème. Vous entrez de très bonne heure à bon vent et soudain vous entendez et voyez des chevreuils pénétrer le territoire mais n’avez aucune possibilité de tir. La suite est moins excitante car vous devez rester là à l’affût jusqu’en soirée en attendant que les chevreuils quittent le secteur. Ne lancez pas la serviette trop vite car beaucoup de ces chevreuils habitant les îlots ou les ravins vont se relever en cours de journée pour manger un peu dans le secteur choisi et peut-être passer à portée de tir.
Si vous n’avez pas cette patience, vous devrez chasser des secteurs de fin de journée seulement et les chasser vraiment en bordure sans possibilité de dérangement. Un affût au sol et discret serait à envisager (photo 6).
Photo 6 : voici une dizaine d’acres d’aulne et de champs qui rapporte un mâle de 3,5 ans à presque chaque année à l’arbalète. Peu de pression de chasse durant cette période et fourrage de qualité au centre stimule un mouvement à chaque soir dans le petit champ intérieur. Le chasseur s’assoit sur une petite chaise pliante au point A par vent d’est et à B par vent ouest ou nord-ouest. Les flèches rouges sont les chemins d’entrées. Les flèches noires sont les chemins de sorties qui furent nettoyés durant l’été pour faciliter la sortie en fin de soirée au cas où des chevreuils sont dans le champ mais jamais à portée de tir avant la noirceur.
Pas de condo…
Ça m’amène à vous parler du dernier point d’intérêt. Les types d’habitats préconisés dans cet article et la recherche de mâle mature ne se prêtent pas à l’édification de mirador de type condo (photo 7). Aujourd’hui avec les multiples modèles commerciaux avec échelle, je vous suggère la discrétion et la vitesse d’un de ces nombreux modèles. N’hésitez pas à camoufler vos installations le plus possible car les chevreuils voient et évitent les infrastructures humaines beaucoup plus que vous ne pouvez l’imaginer.
Photo 7 : les grosses caches très visibles de type condo sont à éviter pour chasser efficacement les petits boisés.
En conclusion, vous voulez tirer avantage du comportement de survie des grands mâles lorsqu’ils sont poussés par des pressions de chasse vers des habitats sous-évalués par la majorité des chasseurs. Avec discrétion et un bon vent, il ne reste qu’à mettre des heures de chasse.
Résumé de la chasse au chevreuil sur de petites terres.